Les animaux dans les films d'horreur
Pour moi, les animaux jouent deux rôles principaux dans les films d'horreur, et les deux sont nazes (pour des raisons différentes).
Chair lecteur·ice 😈
Bienvenue dans l’enfer de cette 71e édition des Papiers Noirs à l’Encre Rouge.
Dans ces Papiers Noirs tu trouveras de quoi (re)découvrir des pépites littéraires et cinématographiques entre thriller, fantastique, horreur et science-fiction. Par le prisme de l’écriture, de la lecture et de l’actualité, c’est sang pour sang '“mauvais” genres.
Bonne lecture !
🔪En un coup de couteau
Les animaux vulgarisés comme des monstres
Les animaux, ces pauvres victimes
J’adore les animaux.
Je t’avais déjà dis que je travaillais dans une association de sauvegarde des animaux sauvages ? Bon, bah maintenant tu le sais.
J’adore les films d’horreur.
Je t’avais déjà dis que j’avais écrit et auto-publié un recueil de 13 nouvelles sombres disponibles en ligne et dans n’importe quelle librairie ? Maintenant, tu le sais !
Mais étrangement, ces deux choses que j’adore me plaisent beaucoup moins quand elles sont mixées ensemble.
Les animaux dans les films sont souvent au scenario pour nous faire craquer, nous faire chialer, nous faire peur… Bref, ils ont été ajoutés ni pour faire joli, ni pour faire réaliste (d’autant que dresser des animaux pour le cinéma c’est une galère et ça a un coût), mais pour jouer un rôle principal : décupler nos émotions en faisant appel à notre empathie.
Bien.
Mais quand on pense “animal” et “horreur”, on a que deux images qui nous viennent en tête :
L’animal tueur, le monstre assoiffé de sang.
L’animal victime, assassiné ou sacrifié.
Les animaux tueurs des films d’horreur sont une plaie
Fais l’expérience, si tu ne me crois pas. Tape “Animal film d’horreur” sur internet et tu verras ce qui ressort.
Mon premier résultat sur Lilo :
J’ai remplacé Google par Lilo il y a 5 ans. C’est un moteur de recherche français, qui ne revend pas tes données personnelle et dont l’argent généré par les pubs est reversé - sans que ça ne te coûte rien à toi - à l’association de ton choix. Depuis le début, j’ai reversé plus de 220 € à Trisk’ailes gratuitement en utilisant Lilo.
Déjà, regarde les résultats en images… Ce ne sont que des monstres. Et le premier lien parle bien d’animaux tueurs.
Le reste c’est :
Les 20 meilleurs films d’horreur avec des animaux géants
Vous aimez “toujours” les animaux ? Liste des 40 meilleurs films
Agressions Animales !!! - Liste de 552 films
…
Alors, oui, il est vrai que j’ai aimé certains de ces films d’animaux tueurs.
Les Dents de la mer de Steven Spielberg (1975), mais sans plus
Les Oiseaux d’Alfred Hitchcock (1963), sans plus
Plus parce qu’ils étaient novateurs, qu’ils étaient originaux par rapport à leur temps, qu’ils traitaient aussi de politique et de société. Ils étaient précurseurs.
Mais la plupart des autres sont de sacrés nanars. Ils existent pour faire du sensationnalisme. Voilà ceux que je n’ai pas vraiment aimés :
Instinct de survie de Jaume Collet-Serra (2016)
Crawl d’Alexandra Aja (2019)
Sous la Seine de Xavier Gens (2024), j’en ai parlé dans cette édition.
Et mon plaisir coupable… Lake Placid de Steve Miner (1999).

Le dénominateur commun, c’est quand même le “monstre aquatique”, t’as remarqué ? Peut-être parce que le large me fait paniquer (et j’habite en Bretagne, bah voyons).
Mais dans la liste des 100 soit-disant meilleurs films d’horreur avec des animaux tueurs de SensCritique, j’en ai vu moins de 10%. Parce que ça ne m’attire absolument pas.
Pourquoi ?
A cause du traitement qui est fait des animaux. Je ne parle pas de maltraitance animale au sens des actes de cruauté dans le monde du cinéma. Je veux parler des choix scénaristiques qui portent préjudices aux animaux dans la vraie vie.
De la même façon que le remake des 101 Dalmatiens, réalisé par Disney en 1996, a déclenché une frénésie d’achat de dalmatiens parce que « Oh c’est trop mignon ! », ce qui a donné lieu à l’abandon de quantité de ces chiens adoptés de manière compulsive, les films d’animaux tueurs ne rendent pas service aux animaux. Bien au contraire.
A ton avis, pourquoi a-t-on érigé le requin au rang de tueur sanguinaire alors qu’il tue une fois sur 4,3 millions (source : International Shark Attack File) ? T’as même rien à craindre si tu vis, comme moi, en France (ou en Belgique, ou en Suisse). Alors que tu devrais largement plus t’inquiéter de la voiture, de l’avion et même de la foudre !
Tu fais peut-être partie de ces gens qui pensent qu’un requin attaquerait un humain en le voyant, sans raison apparente.
“You will never go into the water again.” / « Tu n’iras plus jamais dans l’eau. »
Un slogan qui a fait son effet…
Parce les films d'horreur exploitent nos peurs en exagérant les comportements naturels des animaux, quitte à les fausser ! Le cinéma, ce n’est pas de la science. Et forcément, en découle des préjugés irrationnels qui influencent notre perception des animaux. Comme ça, à cause de la culture.
Les Dents de la mer a eu un impact majeur sur la perception des requins.
S’il étaient déjà méprisés, ils sont devenus des cibles. S’en est suivie une peur généralisée et une augmentation de la pêche sportive et des politiques de chasse aux requins, notamment en Californie et en Australie. Et alors ? Ces pratiques ont contribué au déclin des populations de requins : depuis 1970, 70% de la population de requins et de raies a disparue.
Et tout ça n’aurait aucune importance si les spectateur·ices prenaient davantage de recul. La fiction n’est pas la réalité. Point. Mais visiblement, ce n’est pas le cas de la majorité des humain·es.
Il aura fallu attendre 50 ans avant que Steven Spielberg n’avoue se sentir responsable des effets négatifs du film sur les requins et regretter la décimation de leurs populations.
« Je ne pourrais pas écrire Les Dents de la mer aujourd'hui. Les vastes connaissances que j'ai acquises sur les requins m'empêcheraient de créer, en toute bonne conscience, un méchant de l'ampleur et de la malignité de l'original. »
Peter Benchley, l'auteur du roman original (2006)
Mais le mal était fait…
Les Dents de la mer a tellement bien fonctionné que la production de films d’animaux tueurs a explosé dans les années 70’s.
Et des histoires comme celle-ci il y en a bien d’autres.
Comme les entrepreneurs qui ont abattu un crocodile près d’un lac nommé Lake Placid à Cairns en Australie probablement à cause du crocodile fictif de près de 10 mètres qui est l’antagoniste du film Lake Placid (dont l’action se déroule dans le Main aux États-Unis, donc loin…).
La deuxième phrase de la bande-annonce en VF confirme ce que je disais plus haut sur l’exagération des comportements des animaux pour provoquer la peur.
Je ne parle même pas des oiseaux noirs (les corvidés principalement), qui sont détestés, les araignées, les insectes de manière générale, les chauves-souris, etc.
Mais il y a un aspect qui fait peut-être encore plus réagir les spectateur·ices que moi au sujet des animaux dans les films d’horreur.
Les animaux tués dans les films d’horreur font criser
Honestly, I don't understand why movie directors feel the need to show pets being in any sort of danger like this. You can make a horror movie's antagonist creepy, scary, or unsettling via other ways. (IvanMironov sur doesthedogdie.com)
Soit en français : « Honnêtement, je ne comprends pas pourquoi les réalisateurs se sentent obligés de montrer des animaux de compagnie subir ce genre de dangers. On peut créer des antagonistes de films d’horreur menaçant, effrayant ou inquiétant via d’autres moyens. » (On voit que j’ai fait de la traduction en classe prépa’ 😎)
Avant de continuer, note que @Aurélie à écrit une édition sympa sur les chat dans la pop culture : « Les chats à la conquête de nos imaginaires »
Je n’ai pas la réponse exacte à la question que je pose dans mon sondage. Je n’ai pas trouvé de statistique. Un jour peut-être je me lancerais dans une étude approfondie.
Mais j’ai quand même fait une mini étude. Je me suis rendue sur le site de trigger warning (attention, ce site anglophone spoile allègrement les morts) doesthedogdie.com. Et parmi la liste des films comportant la mort d’un chien, j’ai compté le nombre de ceux appartenant au genre horrifique puis j’ai fait pareil pour la liste des films comportamt la mort d’un chat.
Résultat : sur les 20 premiers films des deux listes, 55 % des films comportaient la mort d’au moins un chat et 60 % comportaient la mort d’un chien.
Et je ne sais pas si c’est mon biais de préférence qui jouait, mais j’étais persuadée que j’aurai bien plus de résultat pour les chats tués. Parce que des visions de chat mort, j’en ai en tête !
Chaque fois qu’un animal de compagnie fait son entrée dans un film d’horreur, tu peux parier qu’il va perdre la vie à un moment ou à un autre.
Je précise que nous ne sommes pas nécessairement témoins de l’assassinat de l’animal. Souvent, le meurtre à lieu hors champ, voire au cours d’une ellipse et on ne découvre que le cadavre.
There is a dead cat in a plastic bag that a child Michael Myers supposedly killed. It is fake but still upsetting. / Il y a un chat mort dans un sac en plastique que Michael Myers enfant a supposément tué. C’est fictif, mais c’est quand même agaçant. (Rose36, doesthedogdie.com)
Mais visiblement, c’est un traumatisme pour beaucoup de spectateur·ices qui ne comprennent pas pourquoi on tue les animaux. Ce n’est pas justifiable. Jamais.
Moi je sais pourquoi. La raison est cinématographique. Elle n’est pas rationnelle, elle est émotionnelle. C’est parce que les animaux (domestiques surtout) sont pour nous l’incarnation de :
l’innocence : ils sont sans défense dans ces films d’horreur ;
la protection : ils sont censés alerter ou gardienner, s’ils meurent alors il n’y a plus de barrière entre lea meurtrier·e et lea protagoniste.
La mort de l’animal de compagnie joue le rôle d’avertissement. C’est souvent une mise en jambe avant la déferlante d’horreur.
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J’espère que cette newsletter sur les animaux dans les films d’horreur t’aura intéressé·e. Si oui, laisse-moi un like avant de partir !
A mercredi prochain 👋
Est-ce que tu as vu la récente adaptation de Simetierre, de Stephen King ? ^^
J'avoue que je fais partie de la team de ceux qui ne supportent pas la mort des animaux dans la fiction (et en réalité, d'ailleurs). J'ai toujours eu une hypersensibilité par rapport à ça. Dans la vie de tous les jours, j'apprécie bien plus la compagnie des animaux, et de mes chiennes en particulier, que celle des Hommes, et l'idée du moindre animal malheureux que je pourrais croiser me plonge dans des états pas possibles. Je peux pleurer très fort pour la mort d'un animal dans un film, une série ou un livre.
Je valide toutefois l'impact émotionnel pour le spectateur/lecteur. Si ça sert l'histoire ou les personnages, je comprends pourquoi c'est fait. Là où ça me met en rogne, c'est quand c'est gratuit.
Passionnant !
Sujet stressant aussi. J'ai en tête Cannibal Holocaust qui, en plus d'être un film ultra gore, a aussi mis à mort, pour de vrai, de nombreux animaux durant le tournage. L'humain a clairement un problème dans sa façon de considérer les êtres qui ne lui ressemblent pas...
Quant à la mort des requins à cause des Dents de la mer, c'est d'une tristesse infinie... Et se dire que Spielberg a mis autant de temps à prendre la parole à ce propos, c'est rageant.
En revanche, bonne nouvelle, si je ne dis pas de bêtise, le chat dans Sans un bruit, jour 1, ne subit pas de sort éthiquement dégueulasse. Peut-être que l'avenir va nous amener à reconsidérer proprement l'animalité dans la fiction ?
Merci pour cette lettre très instructive !