Les tueurs en série sont-ils des monstres ?
Monstre n.m. : personne qui suscite la crainte par sa cruauté, sa perversion / Personnalité de premier plan, qui jouit d'une grande renommée. / Chose qui s'écarte des normes habituelles.
Ca y est, j’ai retrouvé mon rythme de croisière concernant les Papiers Noirs à l’Encre Rouge, et ça m’enchante !
Maintenant que je m’y suis remis sérieusement, j’espère que tu vas retrouver du plaisir à lire ta dose de “mauvais” genre chaque mercredi. Parce que tes interactions me manquent.
Si tu as une remarque, une question, une recommandation à me faire, empare-toi de la section commentaire, fais comme chez toi ! Je te répondrais avec un sourire carnassier 😈
Aujourd’hui, je vais te confronter à ta perception des tueur·es en série pour la questionner à travers des cas réels et une représentation fictive.
Bonne lecture ! 😄
Une sombre histoire de covoiturage
Quand je ne regarde pas des séries ou des films qui dépeignent la vie d’un serial killer, ou quand je ne lis pas un thriller de meurtres en série, j’y pense régulièrement.
Lis la suite avant de me coller une étiquette de psychopathe sur le front.
En fait, j’y pense chaque fois que je pratique le covoiturage avec un·e inconnu·e ou que je croise la route de quelqu’un qui brandit son pouce près d’un giratoire (on leur a dit que ça n’est pas pratique de s’arrêter sur un giratoire pour prendre quelqu’un en stop ?).
Partager une voiture c’est aussi dangereux en tant que conducteur·ice qu’en tant que passager. Je t’assure :
Aileen Wuornos a tué au moins sept hommes en se faisant passer pour une passagère
Jeffrey Dahmer a tué sa première victime en acceptant de la conduire à un festival
Michel Fourniret demandait son chemin à des adolescentes et les faisaient monter dans sa voiture
Francis Heaulme n’ayant pas le permis a sillonné la France en bus et en stop pour vivre sa vie de tueur en série
Pierre Chanal a ramassé en auto-stop sa dernière victime en 1988
Je continue ou t’as déjà prévu d’arrêter BlaBlaCar ?
Ma dernière réflexion en date est la suivante :
On qualifie les tueur·ses en série de monstre pour avoir commis des atrocités difficiles à nommer. Mais ce faisant, on se trompe. On occulte la réalité : il s’agit bien d’humain·es dont le comportement reste médicalement impossible à comprendre ou à prévoir.

On en est là. Tout ce qu’on ne peut pas saisir, on le rejette ou on le traite mal.
C’est d’ailleurs ainsi qu’on fait de la créature de Frankenstein un être malfaisant, en la rejetant. Elle qui ne voulait que reconnaissance et affection, on la fuit, on la craint, on lui crache de la haine jusqu’à ce qu’elle s’incarne en haine.
Imagine que les tueur·ses en série naissent comme ça…
Des monstres victimes
Pour les hommes et les femmes […] coupables et innocent·es mais tous·tes victimes (Femmes serial killers de Peter Vronsky, spécialiste de la justice criminelle)
Avant d’être des tueur·ses en puissances, iels ont été des enfants abandonnés ou maltraités, voire les deux. Ce n’est pas une vérité générale, mais une vérité statistique qui en fait un déterminisme social affreux.
Bébé laissé à la naissance ayant vécu en famille d’accueil ou en foyer pour mineurs, enfant non-désiré, parents irresponsables ou foyer en proie à la violence, mère froide ou sous médicament, père absent ou alcoolique, etc.
C’est horrible de se dire que l’enfance peut déterminer l’avenir, mais c’est un bête effet de causalité.
Si Émile Louis était en proie à des pulsions sexuelles violentes et souffrait d’un vide affectif sidéral, c’était bien à cause du rejet glacial de sa mère.
Si Jeffrey Dahmer était asocial, solitaire et s’intéressait plus aux morts qu’aux vivants, c’était probablement parce que ses parents le délaissaient, sauf pour jouer au taxidermiste avec des animaux percutés sur la route.
Et si Guy Georges est devenu un menteur pathologique, alcoolique, c’est probablement parce qu’il n’a jamais connu ses parents qui l’on abandonné et que sa famille d’accueil lui a révélé l’adoption après 15 ans de vie dans le mensonge.
Je n’entre pas dans les détails, parce que la newsletter serait beaucoup trop longue, mais il y a des tas de facteurs qui ont généralement tout à voir avec la carrière de meurtrier·e de ces personnes.
On aimerait croire que c’est une maladie qui les a dévié de la morale pour pouvoir trouver un remède. Mais le vrai problème est psychologique.
💡 Attention c’est un sujet ultra complexe que je vulgarise. Mais il existe aussi des cas de type “Norman Bates” avec des troubles psychologiques profonds (chez lui c’est un trouble de la personnalité multiple qui induit des black-out) qui s’ajoutent souvent à une construction enfantine anormale pour conduire des gens à voir et considérer le monde de façon étrange. Et finalement Jeffrey Dahmer peut entrer dans cette catégorie par moments.
La réalité c’est que les parents et la société ont contribué à créer ces tueur·ses en série.
Lionel Dahmer, le père du tueur, contrairement à sa mère, n’a pas cherché à l’occulter. Il en a même écrit un livre Mon fils est Jeffrey Dahmer (que je dois me procurer), publié en 1994 et éditée en France en 2023 suite à la série Netflix qui a explosé en 2022.
Anecdote : Lionel Dahmer est décédé le 5 décembre 2023 à 87 ans, de vieillesse et/ou de maladie.
Tu veux encore une preuve que les tueur·es en série ne sont pas des monstres mais bien des humain·es ? On met souvent beaucoup de temps avant de déceler ce qui ne va pas chez eux.
Éternel recommencement
Alors qu’on a mis 10 ans à coincer Jeffrey Dahmer aux État-Unis, au même moment on a mis 20 ans à condamner Guy Georges et plus de 20 ans avant d’emprisonner Émile Louis, en France.
Pourquoi ?
Une négligence coupable de la part de la police et de l’administration dans les trois cas, un racisme évident doublé d’un mépris pour les homosexuels concernant Dahmer, un défaut de professionnalisme patent de la part du parquet concernant Georges, et un manque criant de suivi psychologique et social des meurtriers dans tous les cas.
Malgré ces erreurs gravissimes, jamais aucune sanction n’est tombée pour les magistrats et les flics concernés.
Mais ce n’est pas tout.
Si ça a mis autant de temps, c’est parce qu’on a du mal à croire que le diable vit sur terre.
Pour moi, c’est exactement le propos de Trap, le dernier film de M. Night Shyamalan.
Cooper est un père idéal, un mari exemplaire, un pompier sauveur, un homme de parole et de moral. C’est ainsi que tout le monde le voit.
Pourtant, ce n’est qu’une facette superficielle de sa personnalité. C’est une couverture, façonnée pour flouer les gens et limiter les risques d’être démasqué.
Alors certes, tous les serial killers ne sont pas des calculateur·ices. En fait, la plupart ont tout simplement l’air d’avoir de la chance quand les flics passent à deux doigts de les mettre sous les verrous pour tuerie multiple.
C’est parce qu’à aucun moment ça n’est marqué sur leur front. Banal mais vrai.
Émile Louis avait une réputation de menteur, se montrait autoritaire et froid. Mais dans le même temps, il était décrit comme gentil, serviable, à l'écoute. Un confident affectueux et reconnaissant envers les jeunes qu’il entourait.
Résultat, il a tué plus de huit personnes dont la plupart étaient des enfants et ado de la DDAS et il a carrément agressé sa propre fille qui a écrit Être la fille d’Emile Louis en 2003.
Les tueurs en série dont j’ai parlé dans cette newsletter n’ont pas eu de la chance ! Ils ont été aidés par une société problématiques…
Guy Georges, comme Jeffrey Dahmer, sont tombés très vite dans l’addiction (l’alcool) et, comme Francis Heaulme, ont commis des délits et petits crimes au point de passer un à plusieurs séjours derrière les barreaux. Le développement du mauvais côté de leur personnalité aurait pu être arrêté à de multiple reprises si on avait pris en charge leur santé mentale.
Mais ils n’ont jamais été accompagnés ni suivis par des professionnels.
Qu’ont-ils tiré de la prison mis à part le fait qu’après avoir mal agit on peut retrouver la liberté comme si de rien n’était et recommencer ? Rien…
C’est quelle genre de leçon ?
J’ose espérer qu’aujourd’hui on préconise la thérapie et la psychanalyse beaucoup plus vite et facilement qu’entre 1950 et 2000. Ca ne fera sans doute pas tout. Mais je n’arrête pas de penser que si ces personnes avaient reçu de l’aide quand elles souffraient (souvent à l’adolescence voire à l’enfance), elles auraient eu une chance d’échapper à ce destin morbide.
Les serial killers m’inspirent
De la même façon qu’on ne sait pas expliquer précisément pourquoi Jeffrey est devenu un serial killer et pas David, son petit frère, je ne saurai dire pourquoi les serial killers fascinent autant qu’ils répugnent.
En tant que fan de genre et particulièrement fan d’horreur, je suis sans arrêt confrontée à ce genre d’antagoniste dans l’art que lis et que je visionne.
Et puisque la psychologie des personnages est ce qui me touche généralement le plus dans les histoires, c’est tout naturellement que ça me sert d’inspiration dans les récits que j’écris.
En y repensant, j’ai construit Nick Johnson, le protagoniste de mon roman abandonné Les John Foster, exactement comme un de ces tueurs en série.
Puis j’ai insufflé ça dans quelques une des mes nouvelles et notamment dans Mnemoria, le court thriller d’anticipation présent dans mon recueil 13 Effrois.
Finalement, c’est un peu facile de pointer du doigt les personnes déviantes d’une norme sociétale quand bien même c’est notre faute collective qui l’a transformé en “monstre”.
Avant de partir, j’ai une question pour toi.
Si tu as répondu “Oui”, j’adorerais que tu viennes me recommander un ou deux essai/documentaire que je pourrais me procurer ! Ce serait vraiment chouette., merci !
Si tu préfères les œuvres de fiction sur les serial killers, balance tes coups de cœur en commentaire pour que je me jette dessus 😄
Tes cadeaux pour te remercier de partager “Les Papiers Noirs à l’Encre Rouge”
Pour rappel, si tu recommandes Les Papiers Noirs à l’Encre Rouge à d’autres personnes, voici les récompenses que tu peux gagner :
1 recommandation → Choisis la prochaine œuvre que je chronique (film ou livre).
7 recommandations → La nouvelle Amort au format e-book.
20 recommandations → Mon recueil de nouvelles 13 Effrois au format e-book.
Il te suffit de cliquer sur le bouton juste en dessous pour obtenir ton lien personnalisé :
J’espère que cette newsletter sur notre perception des tueur·es en série t’aura intéressé·e. Si oui, laisse-moi un like avant de partir !
A mercredi prochain 👋
Je vous recommande « The Nightstalker » sur Netflix :)
Naît-on serial killer ou le devient-on, la grande question !
Bon forcément, ça me fait penser à mon roman, où mon tueur en série a eu une enfance bien gratinée, mais est-ce que c'est vraiment cela qui explique son comportement ?
Ce qui me fascine, c'est comme tu expliques ici, c'est le côté opportuniste des tueurs en série, souvent bien loin de l'image du tueur froid qui manigance tout de A à Z avec un plan ultra perfectionné. Et c'est d'ailleurs en partie pour ça qu'il peut se passer des années avant qu'on les arrête (quand on les arrête).
J'avais lu un article il y a très longtemps qui montrait une corrélation entre la légalisation de l'avortement et la baisse du nombre de tueurs en série aux USA, ça fait flipper quand on voit la politique actuelle !
PS : purée les auto-stoppeur sur les ronds-points, mais vraiment, je comprends pas non plus ! Surtout que chez moi ils sont sur celui qui donne sur... l'autoroute ! N'importe quoi.